Soumise à une pression migratoire qui ne se dément pas et à des opinions publiques hantées par le syndrome de l’invasion, l’Union européenne se serait sans doute bien passée des initiatives de trois de ses nouveaux membres. La Hongrie, la Roumanie et la Bulgarie, mandatées par Bruxelles pour sécuriser les frontières orientales de l’UE, ont quelque peu enfreint leur mission en décidant d’ouvrir les portes de la forteresse européenne. Quelque 5 millions de Moldaves, Macédoniens, Serbes, Ukrainiens et Turcs ont ou auront la possibilité d’acquérir un passeport européen en bonne et due forme. L’histoire et ses injustices leur permettent d’emprunter des chemins de traverse. Un cadeau inespéré dont les dirigeants hongrois, roumains et bulgares espèrent secrètement tirer les dividendes politiques. Quitte à faire grincer des dents dans les capitales de la vieille Europe.
Réfugiés en Turquie
À l’instar de la Hongrie, la Bulgarie a facilité les procédures d’acquisition de la nationalité bulgare pour les quelque 2,5 millions de Bulgares de souche vivant à l’étranger. Ils se trouvent éparpillés en Ukraine, en Moldavie, en Albanie, en Grèce mais surtout en Macédoine et en Turquie. Environ 1,4 million de Macédoniens (soit les trois quarts de la population) pourraient bénéficier d’un passeport européen. Au regard de certains historiens, la Macédoine constitue l’une des marches de la nation bulgare. La langue macédonienne ne serait d’ailleurs rien d’autre qu’un dialecte bulgare. Sofia se soucie aussi des Pomaks, Bulgares islamisés à l’époque de l’occupation ottomane. Cette minorité, estimée à 900.000 personnes avant la chute du communisme, a été victime d’une politique d’assimilation forcée qui a culminé à la fin des années 1980. Quelque 350.000 Pomaks se sont réfugiés en Turquie et ne devraient donc pas avoir à attendre une éventuelle adhésion d’Ankara pour obtenir un passeport européen.